Et après ?..

Après le renoncement de François Hollande, la réunion de la « Belle Alliance Populaire », censée mettre sur les rails la primaire de la gauche a donné le spectacle navrant d’un PS sans cap ni boussole. Il venait de perdre son chef naturel, après avoir oublié depuis si longtemps qu’il aurait fallu donner une cohérence à son action. Manuel Valls a beau se jeter dans la bataille, celle-ci ne fera que confirmer les déchirures d’une gauche qui se considère comme irréconciliable et dont F. Hollande aura, en définitive, prononcé l’éloge funèbre.

Que reste-t-il donc à ceux qui ont, envers et contre tout, le cœur à gauche ? Se lamenter devant le spectacle de l’affrontement des leaders socialistes ? Se résigner à la défaite, en sachant que de longues années d’opposition seront nécessaires pour comprendre les erreurs commises, et plus de temps encore pour résoudre la contradiction entre ceux qui entendent gouverner, fût-ce au prix d’abandons et de compromis, et les jusqu’au-boutistes qui rêvent encore d’un grand soir révolutionnaire ?

En seront-ils réduits à voter contre tel ou tel à défaut de pouvoir le faire pour un projet ou des idées ? Ou bien, sans passer par la case « primaire », iront-ils voter pour celui qui veut donner l’illusion d’être leur porte-voix, ce candidat auto-proclamé de sa « France insoumise », un adversaire du « système » parlementaire depuis trente ans ? Un homme qui a adopté sur la Syrie la position de Vladimir Poutine et qui trouve tant d’excuses à Fidel Castro, qu’il se refuse à son propos de parler de violations des droits de l’homme ?

Après la désignation sans bavures de François Fillon sur une ligne résolument à droite, nous assistons aux atermoiements de François Bayrou qui s’interroge encore dans un interminable « j’y va-t-y – j’y va-t-y pas ? » et ne cesse de délivrer ses diagnostics faute d’avoir élaboré un projet qui puisse constituer une alternative. Que leur reste-t-il donc, à ces démocrates modérés en quête de visibilité sur la scène politique après la mise à l’écart d’Alain Juppé ? Attendre que le Président du Modem se présente une nouvelle fois pour achever sa course avec à peine 5% des voix parce qu’il aura oublié de s’imposer un renouvellement que les Français attendent ? Espérer qu’un – ou une – autre se lance dans la course et esquisse ainsi la première étape d’une recomposition de la famille centriste ? Ou enfin rallier la démarche d’Emmanuel Macron qui poursuit sa marche en avant, profitant de l’espace ouvert entre une droite à l’apparence conservatrice, un PS incapable de se réformer et un centre laissé en jachère ?

Il n’est pas étonnant que pendant ce temps, les candidatures se multiplient : à gauche avec tous ceux qui pensent que sur les décombres, l’heure est venue d’avoir leur moment de gloire, ailleurs avec ceux qui, d’Alexandre Jardin jusqu’aux 16 candidats qualifiés dans le cadre de la « primaire.org », tentent de renouer avec la société civile. Des candidatures qui montrent le foisonnement d’initiatives, la quête de renouveau, le besoin de changer de logiciel politique. Mais qui hélas n’ont que leur bonne volonté à offrir en partage.

Cette débauche de candidats et d’idées est à la fois rassurante et préoccupante. Rassurante, car elle démontre la passion des Français pour la chose publique et constitue un signe de vigueur démocratique. Rassurante parce qu’elle nous invite à ne pas désespérer de la politique. Mais préoccupante parce qu’elle démontre une fois de plus que la tentation de la discorde, ce mal bien français, est plus vive que jamais. Préoccupante enfin car elle donne l’illusion qu’il suffit d’un peu de bon sens, d’une exigence éthique et de quelques idées simples (et souvent simplistes !) pour remettre sur les rails un pays qui leur semble à la dérive alors que rien n’est plus complexe.

Sans doute cette offre surabondante est-elle la conséquence des échecs successifs de nos politiques ces dernières années, et du naufrage du quinquennat qui s’achève dans la confusion. Sans doute va-t-elle faire naître bien des espoirs. Mais danger : elle risque aussi de susciter autant de frustrations que d’illusions !..

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