Aurions nous les élus que nous méritons ?

A deux semaines des élections départementales, force est de reconnaître qu’elles ne semblent pas passionner les Français. Il est vrai que ces élections sont organisées alors même que la réforme territoriale inachevée ne permet pas de connaître avec exactitude les compétences qui seront dévolues aux assemblées départementales. On avait d’ailleurs dit bien des choses sur ces départements qu’il fut question de supprimer avant de les réhabiliter ; sur le coût de ces assemblées territoriales ; sur ce « mille-feuille » où les collectivités locales se surajoutent les unes aux autres sans que les citoyens comprennent qui fait quoi. Bref, on aurait voulu encourager les abstentionnistes qu’on ne s’y serait pas pris autrement !

Et pourtant, la diminution du nombre de cantons (quasiment divisé par deux !), l’obligation de présenter des binômes homme-femme étaient de nature à profondément changer la donne. Notamment par le renouvellement des élus que cela entraînera (près de 8 binômes candidats sur 10 sont des nouveaux venus !), mais aussi parce que c’est au travers de ces assemblées départementales que la parité s’imposera vraiment en politique. Dommage : une réforme mal menée et inachevée, l’incompréhension des Français font rater l’opportunité d’une contribution à la refondation de notre vie publique…

Dans ce contexte, l’étude publiée par l’institut Harris Interactive sur le profil sociologique des candidats aux élections départementales mérite réflexion. Elle nous rappelle en effet le décalage entre nos élus et la population active. D’abord en raison de la surreprésentation des cadres et des professions libérales parmi les candidats : alors qu’ils ne représentent que 9% de la population, 28% des candidats appartiennent à ces catégories socioprofessionnelles. Ensuite et surtout, à cause du poids de la fonction publique. On savait déjà que près de 40% des députés sont issus de la fonction publique. Eh bien, ça ne va pas s’arranger dans les assemblées départementales puisque 35% des candidats ayant une activité professionnelle sont également des fonctionnaires ! Cela alors même que 22% seulement de la population active travaille dans le secteur public. Et cette proportion est de l’ordre de 50% pour les formations politiques de gauche (PS et Front de gauche). Pour ceux qui cherchent des explications à l’incapacité de notre pays à réformer sa structure administrative, de tels chiffres en donnent une.

Reste que l’on peut se poser deux questions. La première porte précisément sur les raisons de la surreprésentation de la fonction publique parmi les candidats et les élus. Cela tient-il à des facilités particulières dont bénéficieraient les fonctionnaires pour exercer un mandat et aux garanties que leur offre le statut de la fonction publique qui leur permet – et à eux seuls – de mener une activité politique « sans risque » pour leur carrière ? Il faudra donc sérieusement envisager l’interdiction du cumul d’une fonction élective nationale avec le statut de fonctionnaire comme l’a proposé Bruno Le Maire (qui s’est d’ailleurs appliqué cette règle…). L’autre question est celle de l’engagement des citoyens en politique car au fond, pourquoi se plaindre de politiques dont on dénoncerait la méconnaissance « de la vraie vie », si l’on ne s’y implique pas ? On pourra toujours dire que les logiques partisanes n’encouragent pas les citoyens à cette démarche. Mais alors, soyons lucides : entre désintérêt pour le vote et désintérêt pour l’engagement citoyen, on n’aura au bout du compte que les élus qu’on mérite…

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