L’indécence et la force d’âme

Lorsque survient un drame comme celui d’Annecy mettant en cause un étranger, il y a toujours des esprits pour s’emparer de l’affaire, dénoncer le laxisme des gouvernants quels qu’ils soient, réclamer davantage de fermeté dans notre législation, exiger la fermeture de nos frontières. 

Peu leur importe que des enfants en bas âge soient entre la vie et la mort ! Paniqués à l’idée d’être en retard d’une émotion, impatients de mettre en route la perverse alchimie du malheur qui transformerait les larmes en bénéfice électoral, ils courent de micros en caméras pour y déverser leur haine de l’autre. Dans cette course effrénée entre la droite extrême et l’extrême droite, où les propos des uns s’ajoutent à ceux des autres dans une surenchère politique morbide, on perçoit comme la sourde jouissance de ceux qui trouvent là une nouvelle occasion de briller et de tenter de ravir la palme de celui qui se montrera le plus exigeant. Et soyons sûrs qu’ils éprouvent aussi une muette satisfaction : celle de savoir cette fois que l’assaillant, tout réfugié syrien qu’il fût, est un chrétien, non un musulman. Voilà enfin qui leur évite une énième accusation d’islamophobie !.. 

A ce championnat de l’indécence, à ce concours Lépine des solutions radicales, impossible de décerner la palme ! Transformer les espaces de jeux de nos jardins publics en quartiers de haute sécurité ? Eriger des miradors dans les espaces fréquentés par les promeneurs avec gardes armés autorisés à tirer au moindre geste suspect ? Enfermer les étrangers présents sur notre territoire, y compris ceux qui sont en situation régulière, dans des camps entourés de barbelés comme ce fut le cas lors d’une période peu glorieuse de notre histoire ? Rien de tout cela n’a été proposé, bien sûr, mais soyons sérieux en matière de lutte contre l’insécurité, l’incantation et les amalgames produisent rarement de l’efficacité. 

Il aura fallu qu’un jeune homme s’interpose pour mettre fin à l’horreur. Et derrière un regard et un sourire lumineux, nous avons découvert ce pèlerin des cathédrales qui, ce qui est pour lui une évidence, a puisé sa bravoure dans sa passion et sa foi chrétienne. Alors, bien sûr, des esprits tordus se sont emportés dans certains organes de presse et sur les réseaux sociaux pour déverser leur mépris et leur haine. Il s’appelle Henri d’… , et cette particule lui vaut d’être évidemment suspect aux yeux de gauchistes bien-pensants. Ancien chef scout qui ne fait pas mystère de ses convictions religieuses même s’il ne les brandit pas comme un étendard, cela suffit à le faire détester. A mots à peine couverts, ils lui supposent des affinités avec l’extrême droite, comme pour mieux le dénigrer. L’insinuation leur suffit. Vieille méthode qui ne prouve que la bassesse de ceux qui l’emploient.

De part et d’autre, la médiocrité et l’indécence se sont donnés libre court. Dieu merci, serait-on tenté de dire, la force d’âme est intacte. C’est elle qui a bravé le couteau et arrêté l’effusion de sang. Pas les bavardages des médiocres. 

 

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