Pas le droit à l’erreur…

Il est bien parti ! Inconnu voilà cinq ans, jamais élu parce que jamais candidat à quelque mandat que ce soit, Emmanuel Macron a réussi sa première confrontation avec le suffrage universel. Celui qui avait été le rapporteur de la « Commission Attali » mise en place voici près de dix ans par Nicolas Sarkozy pour « libérer la croissance », celui qui conçu la loi controversée qui porte son nom, pourrait bien l’emporter au soir du 7 mai et devenir, à 39 ans, le plus jeune Président de la République de notre histoire.

Pour y parvenir, encore faudra-t-il qu’il évite les erreurs dans les deux semaines qui lui restent à parcourir. Eviter les images qui, comme celles de la soirée de dimanche, pourraient donner l’impression qu’il anticipe une victoire pas encore acquise. Ne pas confondre insouciance et optimisme de la volonté. Eviter les faux pas dans le débat qui l’opposera à Marine Le Pen, laquelle voudra l’enfermer dans un rôle de champion d’une mondialisation heureuse, tandis qu’elle endosserait le costume de défenseure des oubliés. Ne pas oublier le désarroi de près de 50% des électeurs qui ont, à la fois, rejeté les partis de gouvernement, et exprimé colère et inquiétude…

Et après ? Après, il lui restera à disposer d’une majorité parlementaire. Ce n’est pas gagné d’avance, sauf si l’on considère que le PS voudra s’y rallier pour faire oublier sa faillite, ce qui serait un piège mortel pour Emmanuel Macron. Il lui faudra sortir de concepts marketing pour donner corps à son projet, et adopter une méthode de gouvernement qui permette de dépasser vraiment les oppositions stériles dont les Français ne veulent plus. Il lui faudra réformer sans être prisonnier d’intérêts catégoriels ou victime de frondeurs qui, en agitant la rue, le condamneraient à la procrastination et à l’immobilisme. Il lui faudra aussi savoir écouter ceux qui n’auront pas voté pour lui. Surtout, il lui faudra réussir là où ses prédécesseurs ont échoué…

En attendant, il nous reste à faire le pari de la raison à défaut d’être pleinement convaincus. Il nous faut savoir dépasser les caricatures instrumentalisées au cours de la campagne pour choisir l’avenir. Il nous faut cesser d’imaginer que les perdants auraient été nécessairement victimes de complots alors qu’ils ont perdu d’abord en raison de leur propre aveuglement. Il nous faut cesser de tergiverser en estimant que ce serait bonnet blanc et blanc bonnet car son mouvement créé voici quelques mois pour refonder notre vie démocratique n’a rien de commun avec un parti totalitaire bâti sur la haine qui n’hésite ni devant l’exclusion, ni devant la violence.

Dans les urnes, se jouera à la fois l’avenir de notre démocratie, la cohésion de notre société, le rôle de notre pays et l’avenir de l’Europe. Alors, oui, Emmanuel Macron n’a pas le droit à l’erreur. En attendant, nous non plus !

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Une réponse à Pas le droit à l’erreur…

  1. Serge Galibardy dit :

    C’est vrai, NOUS n’avons pas droit à l’erreur.
    Chacun de nous a durant ces derniers mois cherché à conforter ses convictions en caricaturant parfois à l’extrême les positions adverses.
    Pour ma part je redoute aujourd’hui les attitudes revanchardes et l’esprit de faction qui sont les poisons de la Démocratie.
    N’avoir pas droit à l’erreur, pour moi, citoyen, c’est accepter le verdict des urnes et travailler, de façon consciente et volontaire à la « bien-veillance » au sens littéral du terme: entrer en veille positive, s’appliquer à reconnaître ce qui apparaîtra comme juste et souhaitable tout en maintenant un regard critique mais non belliqueux lorsque les évènements l’imposeront.
    Pour moi, n’avoir pas droit à l’erreur, c’est laisser une chance à ce qui advient même si en moi existe une part sceptique.
    Emmanuel Macron sera probablement notre prochain Président.
    Il arrive comme un jeune prince Shakespearien, brusquement propulsé d’une jeunesse luxueuse et protégée vers le lieu le plus périlleux qui soit: le pouvoir.
    Il n’aura pas droit à l’erreur et nous aurons le devoir de lui accorder le temps de la grâce.

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