Vous avez dit « Républicain » ?..

Dans un mois, à quelques jours près, l’UMP puis le PS tiendront congrès. Le premier changera de nom. L’autre gardera le sien. Anecdotique dira-t-on ? D’une part, ce nouvel avatar « Républicain » de ce qui fut successivement l’UNR, l’UDR, le RPR avant de devenir l’UMP en 2002, ne trompera personne : il s’agira bien du même parti. D’autre part, le refus du PS d’abandonner le qualificatif de « socialiste » ne changera rien à sa manière de gouverner, aujourd’hui très éloignée de ce que furent les idéaux d’une gauche dite « socialiste ». Pourtant au delà de l’anecdote, derrière les mots, se cachent des significations plus profondes.

En s’appropriant le terme « Républicain », les dirigeants de l’UMP font preuve d’opportunisme, à l’heure où il s’avère nécessaire de refonder notre pacte républicain. Sans doute aussi, faire référence au « Grand Old Party » de Bush et Reagan ne les laisse pas indifférent. Enfin, et surtout, ils adoptent un positionnement  et une démarche visant à prendre en mains la « chose publique », tout en se situant clairement dans le cadre d’une idéologie libérale. Derrière le mot, c’est donc une conception de l’Etat qui se dessine. Un Etat allégé, moins interventionniste, recentré sur ses missions régaliennes.

En conservant le qualificatif de « socialiste », alors même que Manuel Vals avait, un temps, souhaité l’abandonner, le PS se refuse à reléguer aux oubliettes ce qui le relie encore à la grande tradition de la gauche française. Pourquoi s’en étonner ? En 1971, François Mitterrand prenait en main la vieille Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO) et la transformait en un Parti socialiste capable de le porter au pouvoir, ce qu’il fit 10 ans plus tard et ce, pour y rester quatorze ans ! Difficile aujourd’hui de rejeter un héritage aussi riche de symboles…

Certes François Hollande n’est pas François Mitterrand. Certes, la Bastille où le « peuple de gauche » s’est retrouvé au soir du 10 mai 1981 était encore au cœur d’un quartier populaire de Paris, devenu 31 ans plus tard, le 6 mai 2012, lors de l’élection de François Hollande, le plus « bobo » de la capitale. Et puis, le PS n’a aujourd’hui de socialiste que le nom, cachant un social libéralisme honteux derrière les oripeaux d’une social-démocratie mal assumée.

Si le PS est donc encore viscéralement attaché à l’adjectif « socialiste », c’est à la fois pour éviter une périlleuse redéfinition de sa doctrine (ouvrir le débat c’est prendre le risque d’une rupture entre courants irréconciliables), et pour ne pas laisser à d’autres la possibilité de s’emparer des derniers restes de la gauche. C’est aussi parce qu’il entend rester le parti qui veut un état puissant, intervenant dans tous les domaines de la vie sociale, économique, culturelle… et soucieux d’y imposer sa loi parce qu’il pense encore que c’est la seule manière d’y introduire davantage de justice. Bref, un parti qui veut encore oublier la douloureuse découverte de Lionel Jospin constatant, en septembre 1999, qu’il « ne faut pas tout attendre de l’Etat ».

Malheureusement, nous assistons au spectacle inverse : celui d’un état d’autant plus impuissant qu’il veut tout définir, tout réglementer, tout maîtriser. Et le PS préfère reculer le moment où il devra prendre la mesure de la paralysie à laquelle conduit cette conception de l’Etat et de la chose publique.

Ainsi, derrière une banale querelle de mots, se profile un débat majeur sur le rôle de l’Etat, les compétences de son administration, l’étendue de la sphère publique. Et si nous ne voulons pas d’un état omnipotent et hypertrophié, et de ce fait impuissant, il faudra bien déterminer ses missions prioritaires, ses compétences et ses obligations, et définir la part d’initiatives et de responsabilités laissée aux individus et aux acteurs de l’économie et de la vie sociale. Sans oublier les mécanismes de régulation qu’il conviendra d’y introduire.

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2 réponses à Vous avez dit « Républicain » ?..

  1. JC Escaffit dit :

    Très juste cette évaluation d’un État omniprésent dans la réglementation, qui souligne davantage son impuissance économique.
    Notre vie politique s’américanise un peu plus. La droite devient républicaine. A quand des socialistes…. démocrates ?

    • Bruno Voisin dit :

      Il faudrait sans doute qu’ils passent par la case « Sociaux-Démocrates » avant d’abandonner le terme « sociaux ». Mais on a vu comme cela a été difficile à François Hollande d’avouer qu’il l’était !

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