Soumission ou Espérance ?

Il y a différentes manières de regarder le monde. On peut avoir les yeux fixés sur le tourbillon de l’actualité et l’écume des jours. C’est le rôle des médias. On peut aussi se pencher sur les courants invisibles et les vagues de fond qui érodent les falaises, modifient les rivages et la carte de nos sociétés. C’est le rôle des penseurs et des philosophes. Et quand les médias nous donnent à lire ces derniers, quand ces derniers s’efforcent de parler un langage clair, cela mérite attention. Cela a été le cas le 25 mars dernier dans les colonnes du Figaro qui a publié un débat entre Michel Onfray et François Xavier Bellamy.

Le premier est connu pour son athéisme et ses positions anti-religieuses. Le second, à la fois philosophe et élu local ne fait pas mystère de son catholicisme. Tous deux en conviennent : notre civilisation semble être sur le point de s’effondrer. Perte du sens de la durée quand le tweet fait office de pensée et quand le culte de l’instant nous empêche de nous projeter dans l’avenir. Perte du lien avec la nature, avec les saisons, jusqu’au rythme naturel de notre propre vie au point d’ignorer ce qui en fait le début et la fin. Déni de la valeur de l’humain lorsque certains affirment que l’on doit pouvoir louer le corps de femmes pauvres pour donner des enfants à des riches prêts à payer. Déni de la mort que l’on veut, par la technique, transformer en un sommeil irréversible. Et, dans ce contexte qui exige à la fois lucidité et esprit critique, tous deux observent le caractère étouffant du débat intellectuel où des chiens de garde du « gauchisme culturel » (pour reprendre l’expression de Jean-Pierre Le Goff) sont prêts à tout, depuis l’insulte jusqu’à l’interdiction d’antenne (au nom de la liberté d’expression !), pour étouffer la parole de ceux qui pensent autrement.

Cependant, ils se séparent sur l’attitude à adopter. Et on assiste là à un renversement, une inversion de valeurs. On se souvient que Marx avait qualifié la religion « d’opium du peuple », dénonçant le fait que cette dernière invitait les pauvres à se soumettre sur cette terre à la loi des riches et des puissants en les laissant espérer le bonheur dans l’au-delà. On se souvient aussi de la violence des propos de Michel Onfray dénonçant la « culture de mort » des religions, en particulier du christianisme qui est pour lui « source d’aliénation ». Selon le schéma de Marx, on pourrait s’attendre à ce que le catholique invite au fatalisme, à l’abandon…

A la question « que dire à un jeune de 20 ans ? », la divergence apparaît flagrante entre les deux philosophes, entre deux conceptions de l’homme et de son rôle. Michel Onfray répond : « le bateau coule, restez élégant. Mourez debout ». François Xavier Bellamy, quant à lui préfère dire : « nous sommes vivants. Quelles que soient les circonstances, l’histoire n’est pas écrite d’avance : le propre de la liberté humaine, c’est de rendre possible ce qui, en apparence, ne l’était pas »…

En clair, nous avons d’un côté le spectateur navré qui assiste impuissant au spectacle du monde qui se défait et qui invite à se soumettre à sa mort. De l’autre, celui qui invite à la vie et proclame sa foi en la liberté et en la responsabilité. Au fond, il y a bien, d’un côté la soumission, de l’autre, l’Espérance. A nous de choisir…

Pour retrouver l’intégralité de cet échange :

http://www.fxbellamy.fr/blog/

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